Les Gens de France Le Dauphin et sa famille
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Retour.... Vendredi 19 octobre 2007 Discours au Château de Vizille - Musée de la Révolution française "Juillet 1788, juillet 1789, juillet 1790 : trois idées politiques..." Edifié au XVIIe siècle, à proximité de Grenoble, par le connétable François de Bonne, compagnon d'armes d’Henri IV, le château de Vizille a accueilli, le 21 juillet 1788, dans sa salle de jeu de paume, l'assemblée des trois ordres du Dauphiné : en réclamant la réunion des États généraux, celle-ci fut à l’origine de la Révolution - ce qui a fait de ce lieu un symbole. Acquis par l'État en 1924, le château a été cédé au département de l’Isère en 1973, qui y a installé le musée de la Révolution française. Qu'un prince de France, représentant la dynastie capétienne, y soit reçu en tant que tel a constitué un moment particolièrement fort, porteur d’une profonde signification. C’est ce que le prince Jean a voulu souligner au début de ce discours, prononcé devant les élus du Conseil général de l'Isère, avant de développer une réflexion sur la fonction de la représentation nationale au sein de l'Etat : juillet 1788, juillet 1789, juillet 1790, trois journées, trois symboles, trois idées politiques... et même quatre ! C’est un plaisir pour moi d’être ici avec vous, dans ce château historique de Vizille, à l’invitation de M. André Vallini, président du Conseil général de l’Isère, président de votre département, votre président, absent pour d’impérieuses nécessités. J’aurais voulu personnellement le remercier de cette réception, si pleine de sens, si pleine même de symboles. Vous le ferez pour moi, Monsieur le Vice-Président, et permettez-moi de vous demander de le faire très chaleureusement. Cette rencontre d’aujourd’hui n’est pas banale. Et je vous remercie tous, mesdames et messieurs les Conseillers généraux, de m’accueillir en ce lieu qui est vôtre, comme je remercie tous ceux qui se sont joints à vous, élus politiques, représentants des corps constitués, des chambres de commerce et d’industrie, journalistes, et enfin vous tous, Mesdames et Messieurs, qui me faites l’honneur de votre présence pour me recevoir dans votre Isère, votre Dauphiné que je puis bien appeler – vous me le permettez, j’en suis sûr – notre Dauphiné. Cette visite est un signe. Le château de Vizille est un haut lieu de l’histoire de France : vous l’avez souligné à l’instant. Et me voici Jean d’Orléans, Jean de France, prince français, issu de la dynastie nationale si liée à toute notre histoire commune, – point que tout le monde sait –, me voici ici, venant comme tel, reçu comme tel et, ajoutons-le aussitôt, sans gêne aucune. En toute simplicité. Prince d’Orléans, prince de France, prince de mon temps et complètement de mon temps, exerçant un métier en France, j’assume tout dans mon héritage personnel, dans mon héritage familial, dans mon héritage national. Pour plagier la vieille formule du poète humain et humaniste : « Rien de ce qui est français ne m’est étranger ».Qu’il me soit permis ici simplement de vous livrer brièvement trois réflexions historiques. Ce qui en amènera naturellement une quatrième, plus politique, mais au sens le plus large du terme, et qui aura le mérite de s'assurer, je le crois, la plus complète unanimité.Première réflexion : juillet 1788. Ce sont les Etats du Dauphiné qui, d’une certaine manière – et d’une manière certaine – ont déclenché les évènements de la Révolution. Ce n’est pas rien que ce soit le Dauphiné ! Or, quel était, concrètement, la conviction ou le fort sentiment qui animait les représentants de l’époque, et cela indépendamment des idées, voire des idéologies, des uns et des autres ? C’est qu’il fallait une représentation libre en face de l’Etat. Cet Etat était, bien sûr, à l’époque, l’Etat royal qui, malgré des défauts, en particulier sa dette, était, l’un des meilleurs du temps, dans son administration singulièrement. Il avait besoin de réformes. Tout le monde le savait, le voulait, mais évidemment jamais pour soi, toujours pour les autres. Et donc une exigence se faisait jour d’une représentation juste et réelle des corps de la nation, spécialement des libertés provinciales toujours chères aux cœurs des Français, et qui aille au-delà des représentations traditionnelles, Parlements compris qui, sous le prétexte de leur pouvoir judiciaire, fiscal, et en quelque sorte, législatif, revendiquaient la souveraineté nationale. Ce qui se pressentait, c’était une représentation nationale véritable qui permettrait un dialogue entre l’Etat et la Nation pour une collaboration législative et politique. D’où l’idée initiale du doublement du « tiers », idée qui, en fait, ne répondait pas exactement à la question : car il ne s’agissait pas tant d’une représentation du tiers que tout simplement d’une représentation nationale. N’était-ce pas l’idée d’un Barnave ? L’évolution sociale et économique entraînait l’émergence d’un besoin politique nouveau.Deuxième réflexion : juillet 1789. Le problème transposé à Paris aurait dû donner son juste fruit. L’Etat capétien n’avait-il pas assuré son autorité en garantissant et en favorisant jadis la liberté communale ? On ne refait pas l’histoire, mais il est permis de penser que l’Etat aurait eu tout à gagner à constituer une représentation nationale forte, cohérente, vraiment décentralisée, c’est-à-dire issue de tous les territoires de France, liée à la vie réelle des régions. Cela s’est passé autrement. Trop de privilèges, trop d’habitudes, trop de réformes à faire - des réformes que tout le monde veut… pour les autres, mais pas pour soi ! -, trop d’idéologies allant dans tous les sens.Troisième réflexion : juillet 1790. La fête de la fédération aurait pu être l’illustration de cette entente entre l’Etat et la représentation nationale, elle-même émanée concrètement de toutes les forces vives de la Nation. Etat fédérateur et représentants fédérés de l’unique et indivisible Nation française sont faits en principe pour s’entendre : c’était l’idée, c’était le projet. Vous savez comment à cette brise d’espérance a succédé la tempête. On ne refait pas l’histoire et nous prenons acte qu’elle est ce qu’elle est.Tout de même, en conclusion, une quatrième réflexion : aujourd’hui les termes du débat sont, mutatis mutandis, sensiblement les mêmes. C’est l’éternelle dialectique en France de l’Etat et des libertés, ces libertés que le peuple français, avec son enthousiasme historique bien connu, appelle « la liberté » dont il se fait héroïquement le champion. Les hommes politiques français connaissent tous parfaitement cette dialectique qui n’est pas en soi mauvaise mais qu’il faut constamment orienter vers l’intérêt commun, ce que je me permets d’appeler tout simplement le Bien commun qui n’est pas, comme chacun sait, une simple addition de biens particuliers, mais qui les transcende par nécessité. Vous le savez bien, vous tous ici, qui, pour la plupart, êtes responsables de décisions collectives. Toute réflexion politique en France, y compris sur les institutions – et c’est le cas aujourd’hui avec les projets de réformes en cours – doit aborder ce délicat problème. L’art politique ne consiste-t-il pas à composer, à concilier autant que faire se peut, tout en prenant les décisions qui s’imposent ? Plutôt que d’opposer, fédérer ? J’ose terminer sur ce mot qui, chez vous, chez nous, est le complément du beau mot de liberté. Mesdames et Messieurs, je vous remercie.
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